Depuis de nombreuses années, ils résident discrètement dans l’un des plus grands congélateurs de la planète.
Le phénomène du changement climatique suscite des préoccupations croissantes quant à ses conséquences potentielles sur les écosystèmes de la planète. Parmi les nombreux défis auxquels nous sommes confrontés, l’une des préoccupations majeures est la libération d’agents pathogènes dangereux qui pourraient être piégés depuis des siècles dans le pergélisol arctique.
Le dégel du pergélisol peut potentiellement libérer des agents pathogènes ou des virus préhistoriques qui étaient emprisonnés dans le sol gelé depuis des siècles, ce qui pourrait potentiellement poser des risques pour la santé humaine et animale. Cependant, jusqu’à présent, il n’y a pas eu de cas documentés de pandémies spécifiquement liées à cette libération d’agents pathogènes du pergélisol au Groenland.
une équipe de chercheurs s’est rendue au Groenland pour collecter des échantillons de sol à partir de tas de déchets humains et animaux, appelés “dépotoirs”, datant de l’épidémie de variole et d’avant. Leur objectif était d’évaluer le risque que, avec le réchauffement de l’Arctique et la fonte du pergélisol, le sol gelé depuis longtemps puisse libérer des agents pathogènes dangereux. Les virus zombies sont une réalité scientifique, ils désignent des virus ou des agents pathogènes qui, après avoir été enfouis ou inactifs pendant une longue période, peuvent être libérés dans l’environnement à la suite de changements climatiques ou géologiques. Le terme de virus zombies ne désigne pas une catégorie spécifique de virus dans le domaine scientifique. Ils sont plutôt utilisés de manière métaphorique pour décrire le concept de virus ou d’agents pathogènes potentiellement dangereux qui pourraient être libérés après avoir été “ressuscités” ou “décongelés” par des conditions environnementales changeantes, la fonte du pergélisol dans l’Arctique en fait partie. L’apparition de plus en plus fréquente de ces “virus zombies” viennent des risques liés au dégel du pergélisol lié au réchauffement climatique.
Les températures dans l’Arctique augmentent deux fois plus rapidement que dans le reste du monde, ce qui soulève des inquiétudes quant à la libération potentielle d’agents pathogènes enfouis dans le sol gelé depuis des siècles. Une virologue du Centre médical Erasmus, qui dirige un consortium européen appelé l’Observatoire des maladies infectieuses émergentes polyvalentes, étudie comment le réchauffement des latitudes nordiques pourrait influencer les maladies infectieuses. Elle souligne que des études récentes ont déjà identifié la présence de virus infectieux dans le pergélisol.
Les chances que la variole ou toute autre maladie comparativement dangereuse surgissent du sol après des siècles de congélation profonde sont faibles, selon un microbiologiste réputé qui dirige un laboratoire à l’Université technique du Danemark, il examine les échantillons de dépotoirs de pergélisol pour extraire l’ADN emprisonné. Il se dit qu’il vaut mieux enquêter maintenant plutôt que d’attendre que quelque chose se soit libéré du sol congelé. Certains scientifiques évoquent cependant que l’effort lui-même ne libère un agent pathogène humain.
Des chercheurs de l’Université d’Aix-en provence ont été les premiers à isoler des virus de l’ancien pergélisol, rapportant en 2014 et 2015 que des échantillons de sol sibérien gelés depuis 30 000 ans abritaient deux grands virus à ADN pouvant infecter les amibes mais ne représentant pour l’instant aucune menace pour les humains. Peu de temps après, cette même équipe, dirigée par un spécialiste du génome, a révélé dans un article scientifique que 13 autres mégavirus de pergélisol infectent les amibes. Le plus vieux mégavirus découvert pourrait dater d’il y a 48 500 ans.
Un pathogène potentiellement plus préoccupant aurait pu émerger du sol gelé. Durant l’été inhabituellement chaud de 2016, Bacillus anthracis, une bactérie présente dans les sols du monde entier et responsable de l’anthrax, a causé la mort de 2649 rennes en Sibérie et a infecté 36 personnes, entraînant le décès d’un garçon de 12 ans. Cependant, établir un lien direct entre cette épidémie et le changement climatique reste difficile, comme l’ont noté les experts lors d’un atelier international sur les menaces microbiennes dans l’Arctique en 2019. Bien que des épidémies de charbon aient déjà tué des rennes en Sibérie il y a plus d’un siècle, le gouvernement russe a mis fin au programme de vaccination des animaux en 2007, ce qui aurait pu contribuer à l’épidémie de 2016.
La guerre en Ukraine a interrompu les collaborations extérieures en Sibérie, où se trouve une grande partie du pergélisol mondial, mettant ainsi en lumière l’importance accrue du travail de VEO au Groenland. L’équipe de VEO a collecté 360 échantillons de sol lors de sa visite en été 2022, en se concentrant principalement sur les dépotoirs, qui peuvent atteindre jusqu’à 3 mètres de hauteur et sont considérés comme des zones à haut risque. Les analyses ont déjà révélé la présence de plusieurs bactéries du genre Clostridium, dont certaines sont responsables d’intoxications alimentaires, de choc toxique et de botulisme.
Les chercheurs prennent des mesures de précaution pour éviter tout risque d’infection. Sur le terrain, ils portent des équipements de protection et ne visitent que les sites où des archéologues prélevaient déjà des échantillons. En laboratoire, les échantillons sont manipulés dans des conditions stériles avec des protocoles stricts de biosécurité. Malgré tout, ils restent tous préoccupés et espèrent que les chercheurs n’essaieront pas de réactiver des agents pathogènes pouvant provoquer des épidémies chez les humains. Il a choisi de se concentrer sur les virus infectant les amibes pour des raisons de sécurité. Un pré-traitement des échantillons est réalisé pour éliminer tout organisme “à risque” avant de les étudier. Il faut également insister sur le fait que les échantillons sont collectés de manière consciente des risques potentiels.
Il existe également des craintes que les agents pathogènes du pergélisol puissent infecter le bétail, puis se propager chez les humains. Si des agents pathogènes dangereux sont découverts, le Groenland pourrait prendre des mesures telles que la fermeture de certaines zones aux touristes et la suspension des fouilles archéologiques. Par ailleurs, il faut souligner l’importance de se préparer même si les risques semblent faibles !
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